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Film

  • God of Bouz IV

     

    Au début des années 80, on croit avoir tout vu, tout fait. On croit avoir survécu à tout ce qu'il était possible de faire. En matière de cinéma, les années 70 auront été fastueuses, peut-être les meilleures, mais elles auront aussi conduit le cinéma aux portes de l'industrie foireuse vers ce que l'on a appelé plus tard, pour faire fun, l'exploitation, exploitation dixit Nelson, à savoir un film, un succès décliné à gogos.

    Par exemple, dans Shaft, un flic black marrave des loubards: boom! S'en suivent des centaines de films où des flics blacks tabassent à toutes bastringues des motards, des mafieux, des hippies et j'en passe. Les genres les plus improbables sont victimes du phénomène: gore, arts martiaux, film de guerre,... Et les genres de s'égrainer: shocksplotation, blaxploitation, sexploitation, warxploitation... A chaque fois un chef de file et une ribambelle de suiveurs pour créer un genre. Les films se font pour trois fois rien, sans prétention.

    Au beau milieu des 80's, décennie du kitsch et comble du nawak, déboule le genre ultime: le film de ninjas. C'est grâce à un brave film de 1985 que naît le genre: American Warrior, American Ninja pour les intimes, avec une star montante de l'action movie: le toujours très expressif Michael Dudikoff. C'est bien simple, sans vouloir caricaturer, Dudikoff ferait passer Steven Seagal pour Marlon Brando. On a rarement vu un acteur "jouer" de façon aussi pathétique et parler de façon aussi peu intelligible. Mais bon, dans un film de ninjas, là n'est pas le propos... Dans un film de ninjas, on se doit d'arrêter les flèches avec les dents, de grimper au mur, de dépouiller des centaines d'adversaires, le tout dans des tenues hyper discrètes, du style camouflage jaune fluo et turquoise.

    Dans American Ninja, Dudikoff incarne une G.I. baptisé Joe (on ne rit pas), un peu tête brûlée, ninja bien entendu, qui doit déjouer les plans machiavéliques d'un groupe de ninjas tous habillés dans des tenues les plus colorées possibles. Le film déboule en plein boom de la vhs et sera un succès. Trois suites feront honneur au premier tome et une multitude de film de ninjas débarqueront tout droit sortie de l'univers du nanar. Le film de ninjas devient une saga allant du films pour enfants (les Ninja Kids) jusqu'aux fusions avec d'autres genres (Ninja vs Shaolin, Les Ninjas contre les Morts Vivants, j'en passe et des meilleurs...). Tout le monde s'y met: les chinois, les italiens (las de faire des Bud Spencer et Terence Hill), les blacks...

    Allez fouiller dans les stations services désaffectées, je suis sûr que vous pouvez tomber sur de vieilles vhs restantes de cet âge d'or du film d'action.

     

  • Invictus

     

    Après Gran Torino, l'Échange, Million Dollar Baby, Mystic River ou son diptyque Pacifique, cet Invictus ressemble à un coup pour rien pour Eastwood. Un petit coup de mou à 80 piges, c'est normal après tout. On en sort surtout déçu par le manque d'audace, par l'académisme du produit fini, fignolé à souhait pour les Oscars avec bande-son omniprésente, happy-end grossier au ralenti et poncifs du genre film de sport. A ce titre, le dernier quart d'heure tient du quasi insoutenable. On a l'impression de voir le sempiternel film de football américain avec les bons gros vieux ralentis sur les joueurs, l'entraîneur, la foule qui regarde cette balle qui lentement, très lentement passe entre les perches. Cerise sur le gâteau ou sur les sablés : les bruits étouffés des hommes transformés en bête au cœur de la mêlée (A-lors... que... re-voi-là... la ... sous-pré-fette...)

    Jusqu'à ce raté final, Eastwood respectait la cahier des charges, sans génie mais avec savoir-faire. Freeman est excellent, Damon aussi. La carte postale décolorée de l'Afrique du Sud post-Apartheid fonctionne à plein tube malgré quelques clichés. A vrai dire, Eastwood s'égare au beau milieu de ses deux histoires: celle des Springboks et celle de Mandela, ne racontant ni l'une ni l'autre. Il s'y égare par manque de parti pris, par manque d'enjeu et les aspects les plus intéressants sont omis ou à peine abordés. On entrevoit à peine la vie familiale chaotique de Mandela. Le personnage nous est offert de façon bien lisse alors que les failles sous la cuirasse l'auraient rendu grandiose.

    Eastwood se contente de présenter la victoire des Boks comme une grande victoire nationale sans aborder, comme pour Mandela, l'envers du décor: une demi-finale usurpée avec un arbitrage plus que douteux et une finale contre une douzaine de All Blacks victimes d'une intoxication alimentaire plus que suspecte la veille du match. La victoire, oui, mais à quel prix ?

     

  • Glory to the Filmmaker !

     

    Takeshi Kitano s'est érigé au rang de cinéaste culte en filmant des flics et des yakuzas à la dérive, des êtres broyés par les règlements et les codes d'honneur, étouffés par une vie qui balaye les proches et terrasse les confrères en un clin d'oeil. Kitano faisait du Fellini, du Ferrara, du Fukasaku avec la dimension tantôt zen, tantôt potache qui le caractérise.

    Avec Aniki, mon frère (2000), Kitano clôturait par un ultime métrage son cycle sur les gangsters. Un ultime voyage en terre yankee comme pour boucler une boucle en se connectant à l'héritage occidental: un yakuza sur les terres du Parrain.

    Depuis, Kitano, qui n'a rien perdu en talent, a décidé de verser dans, disons, l'expérimental. Mis à part la remise au goût du jour de Zatoichi, Kitano a réalise le barré Dolls, le très barré Takeshi's et revient aujourd'hui avec un très très barré Glory to the filmmaker. Rappelons que Takeshi Kitano est connu au Japon comme une sorte de Michael Youn local, un éternel perturbateur des plateaux télés, un clown border line.

    Alors forcément, entre ce personnage décalé et les yakuzas suicidaires d'une partie de sa filmographie, on a du mal à suivre. Et il semblerait que Kitano, lui-même, ne sache plus vraiment qui il est, artistiquement parlant. Dolls, Takeshi's et Glory to the filmmaker sont des films d'un auteur qui expériment mais qui se cherche aussi. Takeshi's et Glory to the filmmaker sont des introspections, des visites guidées des couloirs et des méandres du cinéma. Kitano, pour être enfin pris au sérieux, semble ressentir le besoin d'expliquer, de se justifier. Comme pour permettre au public de mieux discerner les différents genres de sa personnalité. Dans Glory to the filmmaker, il pousse le concept un peu plus loin: il faut discerner un Kitano acteur, un Takeshi réalisateur. Le créateur a peur de se faire bouffer par sa création.

     

  • Mad Max

     

    A l'occasion de la ressortie du film de George Miller dans nos salles (le 9 juillet avec des copies nueves), revenons sur le mythe du guerrier de la route.

    Si le Death Proof de Tarantino a remis au goût du jour les films de poursuite aka road movie, il faut bien avouer que le genre est quelque peu méconnu du grand public comme du public de geeks d'ailleurs plus enclin à s'extasier devant des films SF ou heroico-conano-fantastico-underground. Lorsque Miller filme un Mel Gibson quasi imberbe et, à l'époque, encore à peu près sobre, le genre appartient aux catacombes de la vhs et les films sur l'asphalte n'émerveille qu'une poignée d'élus dans des cinoches crasseux.

    C'est avec cette même crasse que le futur réalisateur de Babe (sic) va, non pas dépoussiérer, mais recouvrir de poussières le genre. Miller choisit de filmer dans les grands espaces australiens, sur des routes qui n'en finissent pas. Il place ses guerriers motorisés dans un futur proche et improbable à la croisée des chemins entre un New York 1997 et un Ken du hokuto . Max appartient à une police musclée qui traque les dangers de la route avec des méthodes quelque peu expéditives.

    Le film est trash, cash comme le sont la plupart des sagas 70's et 80's. Mad Max n'a rien à envier moralement et psychologiquement à ce bon vieux Dirty Harry ou à John Rambo. Du premier opus jusqu'au très mauvais numéro 3, Gibson doit parler quatre fois. Miller préfère faire parler les mécaniques des motos ou des intercepteurs, les engins survitaminés de la police.

    Mad Max est aussi un film de violence pure et gratuite, un film de vengeance froide comme on ose plus en faire aujourd'hui. Dans un monde chaotique et sans lois, Miller ne cherche pas à amadouer ses personnages, à les étoffer sentimentalement parlant. Max a une femme et un fils mais ils ne sont que prétextes à rendre encore plus abjectes les psycopathes qui déferlent sur les routes, ces Aigles de la Mort qui de chasseurs deviendront peu à peu proies d'un homme avec encore plus de folie au fond de l'oeil.

    Mad Max est devenu un genre à lui tout seul et des centaines de films de héros solitaires dans un futur ravagé ont suivi mais je vous renvoie aux prochaines éditions de God of Bouz pour vous en parler