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CULTURE & cie - Page 6

  • Batman - The Dark Knight

     

    Avec son Batman Begins, Nolan ne se doutait pas qu'il allait être l'instaurateur d'un nouveau genre. En effet son Batman est le premier d'une série de films qui s'est fixé comme objectif de revisiter un personnage ou un héros connu dans une gamme largement sombre et ocre. Et de suivre un Superman Returns, un John Rambo ou un Casino Royale, tous aussi hardcore et sombre les uns que les autres. Patientons car l'on nous promet un Conan hard boiled (quoique c'est Brett Ratner qui est désormais aux manettes en lieu et place de Ridley scott...), un Superman life on Krypton et tant d'autres. Sam Raimi (rendons à César, etc...) avait déjà tenté de noircir un peu son Spiderman dans le troisième opus de la saga. Mais l'exercice s'était avéré un peu casse-gueule avec un Peter Parker ado quelque peu cartoonesque.

    Batman painted black donc. Le Begins se clôturait sur une discussion entre Batman et Gordon. Ce dernier dévoilait à Batman qu'un fou d'un genre nouveau semait la panique en ville, perpétrant des crimes à l'arme blanche et signant ces actes avec une carte à l'effigie du Joker. Gordon désignait Batman comme indirectement responsable de l'éclosion de ce criminel d'un nouveau genre. En effet, puisque la police est armée, les criminels le sont aussi; puisque les coffres forts sont blindés, les criminels utilisent des lance-roquettes pour les ouvrir... Et ainsi de suite, Batman a placé la barre plus haute. Le Joker constitue la réponse du crime face aux problèmes posés par Batman. Plus qu'un simple antagoniste, le Joker est la nemesis du Batman.

    Avec The Dark Knight, Nolan décide de placer le choix au centre de son récit et au centre de la mythologie comics en général. Sam Raimi faisait répéter avec redondance dans le premier opus de Spiderman qu'un grand pouvoir impliquait des grandes responsabilités, comme pour mieux souligner le traumatisme de Parker et son implication directe dans la mort de son oncle. Batman, dans Dark Knight, est face à une série de choix. Certains sont existentiels: se retirer et laisser faire Harvey Dent face au crime? Dévoiler son identité? Redevenir uniquement Bruce Wayne pour reconquérir Rachel? D'autres choix sont encore plus difficiles et tout droit sortis des marécages du vil cerveau du Joker: sauver Rachel ou Harvey? Faire sauter un bateau chargé d'honnêtes citoyens ou un cargo convoyant les rebuts de Gotham? Tout le film se résume à travers un seul objet: la pièce de monnaie que Dent jette pour déterminer le chemin à emprunter, pour faire son choix. Un côté pile et un côté face. Mais rien n'est jamais aussi simple car ce symbole même, cette pièce, n'est en fait qu'un leurre qui arbore deux côtés face. Nolan englue son Batman dans un tiraillement sentimental incessant. Plus que jamais sur la corde raide, Batman peut basculer d'un moment à l'autre du mauvais côté allant jusqu'à espionner les citoyens de Gotham avec l'aide, à contre-cœur, de Lucius Fox, désormais alter-ego professionnel et figure paternelle complémentaire d'Alfred. Il n'y a pas que Batman et Bruce Wayne qui soient confrontés au choix dans ce second opus. Harvey dent est au coeur de la question lui aussi. Symbole d'intégrité, la douleur et les plans machiavéliques du Joker le feront basculer du mauvais côté. Gordon aussi doit lui aussi faire des choix: il doit assumer de travailler avec des ripoux pour faire tomber de plus gros poissons et il doit surtout choisir de se faire passer pour mort aux yeux de sa femme et de ses enfants pour attraper le Joker.

    Le Joker. Personnage emblématique de la mythologie Batman. Encore plus emblématique dorénavant après la disparition tragique d'Heather Ledger. Bon gré mal gré, on a désormais sacralisé cette prestation délirante de Ledger qui a donné vie à un Joker beaucoup moins cartoon que celui du grand Jack. Ledger transpire la folie. Les mots s'évadent de sa bouche suturée. Complètement malsain, le Joker est ici une sorte de Keyser Soze qui élabore des plans insensés puis élimine un par un ses collaborateurs. Un très grand méchant de cinéma.

     

  • Fresques Murales - Mona Caron

     

    San Francisco est une ville truffee de fresques murales. La plus part se trouvent dans le quartier hispano, Mission, autour de Mission Street. Ci-contre, le Women’s Building, en est un joli example.

     

    Mona Caron, une artiste d’origine suisse, est en train d’en realiser une nouvelle. Elle est deja l’auteur de plusieurs autres fresques, y compris celle de Duboce Street, situee derriere le magasin Safeway (celle qu’on voit des lignes J et N du MUNI a la sortie du tunnel) ainsi que d’une plus petite fresque situee sur Church Street, au niveau de la 15eme rue.

     

    On l’a surprise en plein travail sur son echaffaudage dans Church Street, en haut de la colline de Noe Valley qui surplombe la ville. Elle nous a explique que c’etait souvent de sa propre initiative qu’elle realise ses fresques, apres avoir propose les projets aux proprietaires des murs. Elle doit aussi parfois faire ses propres demandes de financement.

     

     

     

  • Mad Max

     

    A l'occasion de la ressortie du film de George Miller dans nos salles (le 9 juillet avec des copies nueves), revenons sur le mythe du guerrier de la route.

    Si le Death Proof de Tarantino a remis au goût du jour les films de poursuite aka road movie, il faut bien avouer que le genre est quelque peu méconnu du grand public comme du public de geeks d'ailleurs plus enclin à s'extasier devant des films SF ou heroico-conano-fantastico-underground. Lorsque Miller filme un Mel Gibson quasi imberbe et, à l'époque, encore à peu près sobre, le genre appartient aux catacombes de la vhs et les films sur l'asphalte n'émerveille qu'une poignée d'élus dans des cinoches crasseux.

    C'est avec cette même crasse que le futur réalisateur de Babe (sic) va, non pas dépoussiérer, mais recouvrir de poussières le genre. Miller choisit de filmer dans les grands espaces australiens, sur des routes qui n'en finissent pas. Il place ses guerriers motorisés dans un futur proche et improbable à la croisée des chemins entre un New York 1997 et un Ken du hokuto . Max appartient à une police musclée qui traque les dangers de la route avec des méthodes quelque peu expéditives.

    Le film est trash, cash comme le sont la plupart des sagas 70's et 80's. Mad Max n'a rien à envier moralement et psychologiquement à ce bon vieux Dirty Harry ou à John Rambo. Du premier opus jusqu'au très mauvais numéro 3, Gibson doit parler quatre fois. Miller préfère faire parler les mécaniques des motos ou des intercepteurs, les engins survitaminés de la police.

    Mad Max est aussi un film de violence pure et gratuite, un film de vengeance froide comme on ose plus en faire aujourd'hui. Dans un monde chaotique et sans lois, Miller ne cherche pas à amadouer ses personnages, à les étoffer sentimentalement parlant. Max a une femme et un fils mais ils ne sont que prétextes à rendre encore plus abjectes les psycopathes qui déferlent sur les routes, ces Aigles de la Mort qui de chasseurs deviendront peu à peu proies d'un homme avec encore plus de folie au fond de l'oeil.

    Mad Max est devenu un genre à lui tout seul et des centaines de films de héros solitaires dans un futur ravagé ont suivi mais je vous renvoie aux prochaines éditions de God of Bouz pour vous en parler

     

  • MoAD - visite en live ou en ligne

     

    Le MoAD - Museum of African Diaspora - vient d’ouvrir ses portes dans un une belle architecture du Yerba Buena Garden District de San Francisco, tout pres du MoMA (Musee d’Art Moderne), dans le downtown. Encore en cours de developpement, il traite deja de plusieurs aspects de la diaspora africaine, y compris bien entendu, l’esclavage - avec notamment un documentaire sur le General Toussaint et Bonaparte - la culture et l’histoire africaine, mais aussi l’art moderne africain, ou de descendants africains. En partenariat avec le Bristish Museum, des silex de plusieurs millions d’annees sont non seulement en exposition, mais il possible d’en toucher certains…!

     

     


    Mieux encore que le musee qui ne fait que debuter, le site internet du MoAD propose une visite guidee en video podcast de superbe qualite, ainsi qu’une version interactive de sa photo constituee de centaines de petites photos d’africains et de leurs descendants. Egalement accessible depuis la page d’entree du site, le projet “I’ve known rivers: The MoAD Stories Project” merite un detour. L’idee est de garder une trace de la vie des descendants d’africains a travers leurs propres recits. Cet effeort n’est pas le premier, puisque dans les annees 30 aux Etats-Unis, des ecrivains publics avaient ete envoyes au domicile de centaines d’americains de descendance africaine, anciens esclaves pour relater leur vecu de la fin de l’esclavage. Plusieurs ouvrages ont ete produits a partir de ces recits.

     

  • Soldats des Brumes / Soldat d'aretê

     

    479 av. J-C. La bataille de Platée, ultime affrontement terrestre des Guerres Médiques. Xerxès, vaincu aux Thermopyles puis à Salamine est rentré en Perse, laissant le commandement à son lieutenant Mardonius. Las, ses troupes sont à nouveau vaincus par les Grecs coalisées à Platée. Sur le champ de bataille, un homme se réveille, gravement blessé à la tête et amnésique. Latro (soldat en grec), tel est désormais son nom, est fait prisonnier et esclave. Mais l’amnésie de Latro est d’un type particulier. Il a oublié son nom, ses origines mais se révèle athlète accompli, redoutable bretteur et stratège hors-pair et doté d’un don inédit : il voit les créatures surnaturelles. Dieux et déesses, faunes, fantômes, héros légendaires, Latro les voit et est capable de communiquer avec eux. Mais les problèmes de Latro ne s’arrêtent pas là : il oublie systématiquement tout les évènements de la veille. Chaque matin, ses compagnons doivent lui réexpliquer sa situation et où ses étranges facultés l’ont mené. Car les dieux s’intéressent beaucoup à Latro. Alors, il décide de tenir un journal sur un rouleau de papyrus. En lisant l’histoire de Latro, c’est ce rouleau que vous lisez.

    Sur une idée initiale qui n’est pas s’en rappeler Memento de Christopher Nolan (à moins que ce ne soit l’inverse, Soldat des brumes date de 1986), Gene Wolfe promène son héros et ses compagnons de Platée aux jeux Pythiques de Delphes en passant par Corinthe, l'Andalousie, Athènes, Sparte et même les terres barbares thraces. Ces romans sont remarquables à plus d’un titre. Outre leur foncière originalité, il faut signaler une qualité d’écriture rare et maligne.
    N’oublions pas que nous lisons le rouleau écrit par Latro, avec tout ce que cela comporte de subjectivité (il écrit et décrit ce qu’il voit et ressent) et d’ellipses. Que se passe-t-il quand Latro n’écrit pas ? Gene Wolfe use admirablement de ces possibilités pour plonger le lecteur dans une confusion qu’on imagine proche de celle de quelqu’un qui se réveille sans souvenirs de ce qui précède son éveil. Honnêtement, c’est parfois un peu déstabilisant mais c’est habile.
    De même, Latro mélange (pas souvent, fort heureusement pour nous lecteur) des événement passées (ceux qu’il relatent) avec des évènements présents (ce qu’il se passe autour de lui pendant qu’il écrit). Enfin, dernière élément favorisant l’immersion du lecteur dans cette Grèce du Vème siècle avant J-C, Gene Wolfe mets dans la bouche de ses personnages non pas le nom des lieux et des personnages tels que nous les connaissons aujourd’hui mais tel que les contemporains les nommait. Athènes devient Pensée, Sparte est renommé Corde, Corinthe se dit Tour-Colline et ainsi de suite. Sortez le dico de grec ancien !
    Au total, ces trois volumes sont une lecture hautement addictive qui vous plongent dans un univers novateur et d’une incroyable richesse, un tantinet frustrante à cause des ellipses et de sa conclusion mais si passionnante qu’on oublie vite les quelques défauts.
    Je ne peux que vous conseiller de vous mettre aux aventures de Latro, le soldat d'arretê amnésique largement digne des héros antiques (d’ailleurs on en croise dans ces volumes).

    Saga composée de trois volumes en VF publiés par Denoel dans sa collection Présence du Futur dans les années 90 et non réédité depuis hélas. Plus qu'à fouiller chez les bouquinistes !
    t1 : Soldats des Brumes
    t2 : Soldat d'aretê 1
    t3 : Soldat d'aretê 2

     

  • Katsuhiro Otomo - Anthology

     

    Mieux vaut tard que jamais (la parution originale date tout de même d'il y a 13 ans), ce premier volume d'une anthologie en deux parties consacrée à Katsuhiro Otomo sort enfin chez nous en français. Il y a 20 ans surgissait pourtant au Japon son chef d'œuvre "Akira". Pour toute une génération (dont je fais partie), et ce dans tout le monde occidental, cet univers post-apocalyptique a ouvert brutalement la porte sur le manga et l’animation japonaise quand il a été exporté. Mais bien avant la publication tardive de ce recueil, le retard a quand même été quelque peu comblé pour découvrir l'œuvre d'Otomo dans son ensemble, que ce soit en manga ("Dômu", mais aussi "Zed", "tekken" ou "Mother Sarah" au scénario) ou en anime ("Steamboy" et récemment "Freedom Project"). Et s'il existe encore bien des "one-shots" qui n’ont jamais été traduits ni en anglais ni en français, c'est surtout par le fait de leur auteur qui ne souhaite pas ressortir ses œuvres de jeunesse (d'ailleurs, Jean Giraud aka Moebius - admiré par nombre de mangakas - ne saurait pas pour rien dans cette nouvelle publication).

    Les fans de la première heure comme les plus tardifs seront donc ravis à la lecture de cette dizaine d'histoires courtes datant de la période pré-"Akira", de 1977 à 1981. Presque indispensable quand on sait que parmi elles se trouvent les prémisces de "Memories" - ou plutôt du premier segment "Magnetic Rose" -, et surtout "Akira". Le film d'animation du même nom semblerait presque même découler de ce "Fire Ball", tant on en retrouve déjà tous les ingrédients : violence urbaine, pouvoirs psychokinésiques (qui seront également présents dans "Dômu") et apocalypse. C'est aussi le témoignage de l'émergence d'un auteur qui tranche à l'époque dans son pays, où dominent les histoires sentimentales, pour proposer les siennes inspirées par la SF occidentale, que ce soit les nouvelles de Philip K Dick ("Farewell to Weapons") ou les bandes dessinées de Moebius justement ("Flower"). Mais pas seulement, les histoires offrant ici sur 260 pages des variations de style jusqu'à aborder le récit comique. L'occasion donc de découvrir par là-même une facette méconnue de Katsuhiro Otomo, à travers "Hair", où des rebelles chevelus fans de rock s’opposent à une société rigide dirigée par les "cheveux courts", ainsi que quelques parodies de classiques occidentaux.

    Le talent de l'artiste n'est plus à prouver, mais il était bel et bien présent dès ces débuts en images, déjà avant sa consécration.

     

  • clotilde courau dans madame figaro

     

    Mesrine - L'Instinct de Mort

     

    Cassel. Richet. Mesrine. Voilà le propos, somme toute assez sobre, de l'affiche du film. C'est clair, limpide, comme une affiche de boxe catégorie poids lourds. L'acteur français le plus doué de sa génération (César garanti... voir Clotilde Coureau dans madame Figaro), un réalisateur jadis en devenir et aujourd'hui confirmé (Assault sur le Central 13 était génialement filmé, désormais on frise le Michael Mann à la française). Et enfin, un sujet, un vrai: un biopic sur Jacques Mesrine, personnage atypique, à l'aura quasi légendaire dont le nom résonne comme Capone ou Scarface. Mesrine était tout à la fois: charismatique et psychopathe, attachant et repoussant. Il n'était pas un Robin des Bois ("Je vole aux riches mais je garde tout pour moi").

    Son nom est devenu grand car ce nom définissait un visage et un être insaisissables, indomptables. A cela, il faut mêlé le sens du spectacle et de la mise en scène et le goût d'être reconnu, de jouer avec les médias, à grand renfort de livre (L'instinct de mort est avant tout le nom de la propre autobiographie du criminel). Mesrine titillait les imaginations: il accaparait l'actualité par ses braquages et ses évasions, se jouant du système, narguant la police et la pègre, véritable électron libre. Enfant de Clichy, traumatisé par la Guerre d'Algérie à sa façon: elle lui a avant tout donné le goût du sang dans la bouche, Mesrine est surtout un homme dangereux que l'on trouverait peut-être insipide aujourd'hui.

    Trop violent pour être l'héritier des caids de la French Connection, il obéit surtout à son instinct et n'a de cesse de rebondir, quitte à faire des choix improbables (voir la tentative d'évasion qui tourne à la boucherie lors de son séjour au Canada). Cassel retranscrit parfaitement les sauts d'humeur et de comportement de son personnage: tantôt fleur bleu avec son amour espagnole, tantôt porte flingue au grand coeur qui veut venger une prostituée puis abjecte sicaire la scène suivante. Mesrine arpente tous les différents degrés du côté obscur: d'abord Lupin puis Lecter.

    Cette première partie du film de Richet se base donc sur les écrits de Mesrine lui-même avec toutes les limites que comporte un récit autobiographique. Il conserve sans doute des parts d'ombre mais ne s'embellit pas nécessairement: sans doute, le récit de son séjour en haute sécurité est-il fait pour le dépeindre en martyr ou en héros mais ses relations conflictuelles avec son épouse (il va jusqu'à lui mettre une arme dans la bouche sous les yeux de son fils) égratigne un portrait qui aurait été ou supposé être un brin onirique ou du moins fantasmé. C'est sur cette corde raide que semblent jouer les publicitaires avec l'affiche du second opus qui dévoile un Cassel/Mesrine, dégoulinant de sang après avoir été abattu comme un chien par les forces de l'ordre. Mesrine devient une figure christique qui figure l'ambiguïté du/des films de Richet et la question qui taraude le spectateur: ordure ou héros?

    On rit de la gouaille du jeune Mesrine lors de son premier cambriolage et on s'enfonce dans son siège lorsqu'il torture un mac maghrébin. On passe par tous les états. Vivement la chasse à l'homme, la traque. Vivement la suite.